Goliarda Sapienza – L’Art de la joie – Le Tripode
Traduction de l’italien par Nathalie Castagné.
Immense fresque, les aventures de l’héroïne Modesta, qui transgresse les règles afin de découvrir le plaisir spirituel et charnel. Des scènes inoubliables, un texte cru, abrasif. Superbe.
L’Art de la joie impressionnant et beau roman a été écrit par Goliarda Sapienza, comédienne (elle a joué avec Visconti) et aussi écrivaine. Elle est née à Catane en Sicile en 1924 et elle est morte en 1996.
Après avoir mis fin à sa carrière de comédienne dans les années 60, elle commence à écrire des récits d’inspiration autobiographique. Mais sa grande œuvre sera son roman L’art de la joie qu’elle a écrit durant près de dix ans entre 1967 et 1976. Le roman jugé trop contestataire et féministe ne sera pas publié en Italie. Il faudra attendre 2005 avant que Viviane Hamy édite ce lumineux roman. Traduit en plusieurs langues il connaitra un immense succès et sera enfin reconnu en Italie comme un classique de la littérature.
L’art de la joie retrace l’histoire de Modesta, née le 1er janvier 1900, jusqu’aux années 50. Modesta est une enfant née dans un milieu aussi pauvre que sordide, elle tente de grandir entre une mère dont « les cheveux de lourds voiles noirs sont recouverts de mouches » et une sœur trisomique « qui la fixe de deux fentes sombres ensevelies dans la graisse ». Les premières pages sont d’une violence inouïe, avant que l’on ne comprenne que Modesta, grâce à son intelligence et sa détermination ne suivra pas le destin qui lui a été désigné à sa naissance..
Modesta est un prénom rare et aussi mystérieux que celui de Goliarda (qui signifie paillarde). Deux prénoms insolites qui se font écho pour conquérir l’art de la joie, de la vie. On peut penser que c’est par la voix de Modesta que Goliarda nous fait partager sa quête de liberté : son opposition à l’Italie de Mussolini, son engagement dans les luttes politiques et l’émancipation féminine. Modesta bouscule les codes, elle est profondément indépendante. Elle découvre le savoir dans la lecture de philosophes, poètes ou romanciers, et aussi par la mise en jeu de son corps qu’elle offre à la nature dans le belles scènes faites de parfums et de couleurs et à ses amours qui s’accordent autant au masculin qu’au féminin.
L’art de la joie est le livre de toutes les libertés et de toutes les inventions, il fait fi des conventions pour mieux entrainer le lecteur dans un tourbillon de vie et de lumière qui l’accompagne longtemps une fois la lecture finie.
Arlette Mondon